L'indignation est à son comble ! Des mosquées et des mausolées du XVe s. sont détruits à la pioche par les islamistes d'Ansar Eddine. Le TPI déclare "C'est un crime de guerre pour lequel mes services sont pleinement autorisés à enquêter". Etc. L'islamisme, encore lui ! Cela m'évoque deux questions :

 

   Etaient-ce les islamistes qui ont détruit Reims, qui ont inutilement rasé Dresde, Hambourg, Berlin, qui ont vitrifié Hiroshima et Nagasaki, qui ont expédié l'élite de leurs peuples dans les goulags et autres camps d'extermination, etc. ? A part à Nuremberg pour l'Allemagne, impunément. Avons-nous des leçons à donner ? Même drapés dans les oripeaux de juges contestés.

 

   Si ces monuments exceptionnels sont détruits, c'est bien parce qu'ils le sont, au dire même d'Ansar Eddine : "Certains disaient que le jour où on ouvrirait cette porte, ce serait la fin du monde et ils ont voulu montrer que ce n'est pas la fin du monde". N'est-ce pas le triomphe de la normalité ? De l'homme normal sur l'élite ? L'homme qui bouffe, qui pète, qui baise, qui embrasse ses frères et tue les autres, qui vénère les dieux et fait ses sacrifices ? De l'homme soumis à sa libido et à sa pulsion de mort, dirait Freud. Normal, quoi !

Il me semble que cette normalité triomphante est profondément moderne. On l'appelle souvent égalitarisme, au nom de quoi tout ce qui dépasse doit être ramené dans le rang, dans la norme définie par la masse. Hannah Arendt, dans son livre remarquable "Condition de l'homme moderne", voyait monter cette menace. Car c'en est une. Qui pourrait croire que les oeuvres admirables de l'humanité, les grandes civilisations, sont le fait d'hommes normaux ? Et qui peut croire que s'en priver ne nous ramène pas à l'état de nature et à ses horreurs ? On le constate à Tombouctou aujourd'hui.

Cet islamisme moderne se trompe. On ne prive pas sans les désespérer, les hommes de leurs illusions, de leurs rêves, de leur histoire, pour une loi, aussi divine soit-elle. Il en récoltera des fruits amers. Comme le national-socialisme et le communisme avant lui, produits de notre égalitarisme moderne destructeur, qui décrète le normal et y ramène de gré ou de force. Comme notre socialisme d'Europe, normal et imbibé d'égalitarisme, qui continue la sape économique et morale de tout ce qui sort de la masse, plutôt qu'en faire une source d'espoir. La différence avec les malheureux de Tombouctou, c'est que nous l'avons choisi...