Une théorie scientifique (une représentation humaine du monde par une formule ou un modèle) qui a été 'vraie' à un moment de l'histoire ne devient jamais 'fausse', tout au plus imprécise ou incomplète. Mais n'oublions jamais qu'elle n'est pas la 'vérité', mot creux, chargé de rêve.
On entend souvent dire que de nouvelles théories (l'héliocentrisme, la relativité, la mécanique quantique, etc.) sont venues en remplacer d'autres, devenues fausses. Quand la criminogène passion pour la 'vérité' (et d'autres intérêts plus matériels) s'en mêle, comme au 17e. siècle où la représentation du monde se calculait plus facilement avec le soleil au centre du système planétaire (l'héliocentrisme) plutôt qu'en plaçant la terre au centre, la violence n'est pas loin.
Mais alors, le soleil est-il au centre du monde ? Pas du tout ; il ne s'agit que d'un artifice de calcul, plein d'élégance, mais vide de sens et d'ailleurs pas très précis. A ceux que cela intéresse, on cherche toujours le centre du monde, en oubliant que le mot 'centre' lui-même est un outil mathématique, rien de plus. Désespoir des penseurs avides de vérité ... Mais, hélas, le sens commun partage encore cette vision qu'existe une vérité que l'on approche peu à peu en la découvrant alors que c'est exactement l'inverse : c'est l'homme qui, peu à peu, étend ses outils mentaux sur le réel pour avoir prise sur lui.
Une théorie qui a permis prévisions et actions efficaces sur le monde n'a aucune raison de ne plus le permettre lorsqu'une nouvelle théorie nait, fournissant des outils plus subtils. Simplement deux événements se sont produits :
- la précision des observations a augmenté en raison du perfectionnement des outils de mesure. Des phénomènes, jusque là invisibles sont devenus perceptibles.
- la conceptualisation du savoir scientifique a fait un progrès, celui des outils mentaux (les mathématiques) qui ont permis une nouvelle manière d'écrire notre représentation du monde, plus fouillée, plus précise.
Ainsi naissent de nouvelles théories promues 'vraies' parce qu'elles représentent mieux les faits observés que les anciennes, mais surtout parce qu'elles prévoient des événements, imprévisibles sans elles et que l'on observe effectivement.
Mais ces nouvelles théories n'ont en rien condamné les anciennes, dans leur domaine de précision (de validité). Au contraire, même, toute nouvelle théorie doit, à la limite de l'ancienne précision, s'ajuster à l'ancienne théorie. La mécanique quantique doit rejoindre la mécanique classique de Newton dans le macroscopique, comme la relativité doit le faire aux vitesse faibles.
Jamais il n'y a rupture, mais toujours continuité. Il n'y a ni plus ni moins de vérité hier qu'aujourd'hui !
Disons-le autrement : rien n'est jamais vrai, ni faux dans ce domaine. Notre seul progrès dans la compréhension du monde (et de nous même) est celui de notre représentation (humaine et humaine seulement) de celui-ci et de notre capacité à prévoir et agir.
Quant à savoir ce que le monde 'est', la question n'a pour moi aucun sens puisque ma seule approche n'est que celle que fournit ma représentation en perpétuelle évolution et, j'ose encore le dire, en progrès.