Le journal "Les Echos" de ce matin, 18/01/2017, publie un article "Les Français réclament un fort renouvellement des pratiques politiques" qui montre clairement (voir les tableaux ci-dessous) l'intérêt des Français pour la politique et, paradoxalement, leur défiance vis-à-vis de leurs représentants et leurs partis. Je voudrais avancer un point qui me semble important, contenu dans le titre de ce papier.
Pour 89% des sondés, les responsables politiques« ne se préoccupent pas de ce que pensent les gens comme nous », peut-on y lire. Ce point me semble essentiel : ce ne sont pas des gens comme nous. Ils ne nous représentent plus ; ce sont des spécialistes, des techniciens de la politique. Ils font leur travail comme d'autres, mais rien ne leur donne plus une raison particulière de mériter notre confiance ni la délégation de pouvoir consentie librement qui fonde la démocratie. On les craint ignorants du "vrai" travail et de ses contraintes, attirés par le pouvoir et l'argent ( pour 75 %, ils sont « plutôt corrompus » ), loin des préoccupations du peuple réel.
Un éclairage complémentaire est fourni par un autre tableau du même article, qui mesure la confiance dans les institutions, qui sont, elles aussi, ce qui fonde une démocratie dans sa vie pratique. Là les partis politiques recueillent 10% de confiance quand la justice, les églises ou les entreprises en recueillent 40% et la santé, l'armée, les PME et la police recueillent 80%. Les partis apparaissent comme une corporation dont on se méfie, dirigée par des professionnels ayant leurs intérêts propres et non comme la matrice de notre vie politique.
J'ai la conviction que le rapprochement de ces deux observations est un fort indice pour pouvoir affirmer que des hommes politiques professionnels, aussi dévoués et enthousiastes qu'ils peuvent être ne franchissent pas la barre de "respectabilité politique" qui leur est nécessaire pour représenter sereinement les citoyens et mériter leur confiance. Un guerrier, comme de Gaulle, un banquier comme Pompidou ou Macron, un avocat, un médecin ou un ingénieur comme d'autres sont plus acceptables que des politiciens de carrière, comme l'est notre dernier Président et ceux qui, majoritairement, l'entourent. Ceux-ci transforment l'Etat en une société de services, sans d'ailleurs beaucoup de compétence et sans en assurer l'équilibre. Est-il étonnant qu'ils subissent un tel rejet ? Ce n'est pas un rejet de leur politique (en ont-ils une ?), mais de leurs personnes et ils n'y peuvent rien.
Je pense donc que cette montée, puis le maintien au pouvoir politique suprême ne doivent pas pouvoir résulter d'une carrière type Sciences Po, Ena et autres. Un certain nombre de fonctions représentatives clés ( où j'inclurais certainement Président, Député, Sénateur, président de Région et d'autres) doivent être protégées de cette transformation en Société de services en limitant par exemple à 5 à 10 ans pour la vie, la possibilité d'y accéder. Ceux qui ont la vocation du service public ont mille moyens d'y travailler, mais sans prétendre représenter les citoyens.
N'y a-t-il pas là un sujet à aborder à l'occasion du prochain mandat que les citoyens vont donner à leurs représentants en 2017 ? S'ils croient à la démocratie représentative et s'ils sont conscients de son image actuelle, ils doivent prendre le problème en mains. Il me semble que le temps presse...