Court voyage, du 9 au 19 septembre 2017.
Cette photo me paraît en harmonie avec une toute première et imparfaite impression, laissée par ce voyage.
Un espace minéral et vaste, d'eau et de crêtes montagneuses, souvent desséchées. Un espace où l'absence du mont Ararat, livré aux Turcs par des traités absurdes, est une blessure irréparable.
Un univers presque vide où résonnent partout et toujours le souvenir des morts qui devraient être là, emportés par les crimes et les catastrophes naturelles qui se sont acharnés sur ce peuple. Un peuple trop peu nombreux pour être réellement indépendant, menacé par son voisinage, insuffisant quant aux compétences réclamées par notre monde complexe et qui a un besoin vital d'un appui bienveillant.
Sous le poids de cette inquiétude lancinante, l'Arménie s'appuie à l'excès sur deux béquilles qui me semblent fragiles, voire illusoires: le passé où l'Arménie fut glorieuse, la "Grande Arménie" qui ne reviendra pas et la religion, manière irrationnelle de se persuader que le monde a un autre sens que celui qu'on lui donne par ses actes, jour après jour.
L'Arménie porte encore la marque du communisme, dont elle fut colonie de l'empire. Elle semble avoir bien du mal à s'en remettre et à retrouver un dynamisme. Des friches industrielles à l'abandon, des infrastructures en déshérence, un entretien public ou privé des biens qui fait défaut, des mafias fortes, tout cela rappelle l'épuisement et le fatalisme des victimes des totalitarismes, où plus personne n'est responsable de rien et les gouvernants des gestionnaires faibles.
Et pourtant, ce pays meurtri et un peu triste est attachant. Il est beau par son histoire, ses paysages, son exceptionnelle architecture du 7e au 13e siècle, sa rage de survivre et parce qu'on sent qu'il a une réserve qui ne s'exprime pas encore, mais que sa capacité de résistance a prouvé. Saura-t-il passer à l'étape suivante ?